La folle aventure des épées de l’âge du Bronze !
Sorties des réserves du Musée Savoisien, deux épées sont parties en Belgique pour se faire étudier sous toutes les formes. Elles ont en effet été intégrées par Léonard Dumont, chercheur doctorant en archéologie, dans son corpus de thèse. Suivez cette aventure en plusieurs étapes…
Nos deux épées de l’âge du Bronze, Léonard Dumont était déjà venu dans nos réserves pour les dessiner et avait par la même occasion identifié l’un de nos moules comme un moule d’épée. Comme elles ressemblent à celles d’Allemagne pour la même période (il y a 3000 ans environ), il ne lui en a pas fallu plus pour décider de les intégrer dans son corpus de thèse intitulée « Production et diffusion des épées à poignée métallique en Europe occidentale ».
Direction la Belgique pour un interrogatoire poussé
En octobre 2020, nos deux épées sont parties pour quelques jours dans un laboratoire belge, afin d’être étudiées sous toutes les formes.
Il s’agissait de réaliser des analyses chimiques élémentaires, destinées à mieux connaître l’alliage et en comprendre la recette, et des analyses isotopiques qui permettraient de dire si les métallurgistes s’approvisionnaient toujours dans les mêmes mines ou non (et parfois lesquelles !) :
- Prélèvements de métal dans la lame et dans le manche, pour voir : la composition exacte / est-ce que c’est fabriqué avec les mêmes métaux ? les mêmes proportions ? qui viennent de la même région ?
- Radios
- Tomographie (sorte de scanner en tranches régulières), dont on ne connaît pas encore les résultats.
Concernant la ressemblance à celles d’Allemagne pour la même période (il y a 3000 ans environ), l’idée était aussi de voir s’il s’agissait « juste » d’une affinité de forme ou s’il y avait aussi la même technique et les mêmes sources d’approvisionnement.
Après 3 000 ans, les épées rendent enfin les armes
Quelques jours plus tard, nos épées ont réintégré les réserves du musée. Elles n’ont pas résisté à l’étude de Léonard Dumont qui nous a fait part de son analyse visuelle et de ses premiers résultats :
Généralité :
- Datation : entre -800 et -900 (Bronze final)
- Epées très bien conservées, probablement jamais ou très peu utilisées, encore tranchantes
Le manche et les lames :
- Les lames de ces deux épées sont d'assez mauvaise qualité
- A la radio, on voit qu’ils ont été soudés avec un autre métal par l‘intérieur, avec une longue tige. Cette réparation est contemporaine (entre la découverte au 19e siècle et aujourd’hui), elle était visible de l’extérieur mais il n’était pas possible de dire comment elle était effectuée
- Il est possible qu’ils n’aient pas été produits au même endroit
- La cassure des deux lames est probablement récente, peut-être lors de l’extraction (pêches aux Antiquités). Il ne s’agit probablement pas de bris rituel (les épées de la même époque trouvées en Région AURA ne sont habituellement pas brisées, ailleurs en Europe il existe une tradition de bris d’épée aux passages à gués et dans les lacs et sources)
Les décors :
- Les rivets du manche n’ont aucune fonction utilitaire, c’est un décor qui rappelle des épées de l’âge du Bronze ancien (plus ancien donc), où les rivets tenaient des éléments d’amélioration du confort de prise en main de la poignée
- Ils ressemblent à des épées trouvées en Allemagne
Le site de provenance (station de Grésine / Lac du Bourget) :
- Le Lac du Bourget est le seul site d’Europe où ont été trouvées à la fois des épées à poignée métallique et un moule (de manche), même s’il n’a pas servi à produire exactement cette épée. Il y avait probablement un centre de fabrication de manches d’épées au lac du Bourget
- Les épées ont probablement été déposées intentionnellement (pas une perte)
Des épées qui n’ont pourtant pas dit leur dernier mot
Un souvenir d’outre-tombe ?
À ce stade, Léonard Dumont peut déjà émettre une hypothèse : le milieu lacustre.
En effet, les milieux humides sont à cette période le prolongement du domaine funéraire, le défunt est enterré sur terre, le mobilier en milieu humide. Peut-être est-ce un dépôt en souvenir de quelqu’un enterré ailleurs ?
Que pourra-t-on en déduire en comparant à d’autres études ?
La place de l’atelier du Bourget dans l’économie européenne, dans les échanges entre puissants ; éventuellement les sources de minerais ; les similitudes de décors, de techniques et de composition des épées ; le lien entre ateliers de lames et ateliers de poignées ; les pratiques de dépôts d’épées au Bronze final, soit quelques générations à peine avant l’âge du Fer.
A NOTER :
Les études montrent qu’il s’agit de deux épées fabriquées en deux parties : d’abord la lame, puis la poignée fondue directement sur la lame déjà solide.
Ces études ne sont pas terminées, les tomographies viendront plus tard, les données étant en cours de traitement et les résultats des analyses physico-chimiques aussi.
L’étude complète de nos épées par Léonard Dumont sera publiée dans notre revue numérique.
Il publiera également en anglais dans une revue internationale les résultats de l’étude de toutes les épées.
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