Les Archives départementales de la Savoie ont la chance de conserver de riches et nombreuses représentations cartographiques du territoire. L'une d'elle, le cadastre est toujours très consultée aujourd'hui.
En effet, au-delà de son objectif fiscal, il permet de rechercher le propriétaire d'un terrain ou une maison, de trouver la liste des parcelles possédées, leur surface et accessoirement leur valeur foncière.
C'est le plus ancien cadastre cartographié à l'échelle d'une province en Europe ! Les mappes sardes sont des documents exceptionnels et uniques, sources inestimables pour les historiens.
L'idée lancée par Victor Amédée II, est réalisée par son fils, Charles Emmanuel III. Despote éclairé, il met de l'ordre dans les finances, « fonctionnarise » l'armée et l'enseignement, abrège les longueurs de la Justice et organise le cadastre. Il a été réalisé entre 1728 et 1738 par l'administration du royaume de Piémont-Sardaigne.
L’innovation principale est la confection des mappes, c'est-à-dire les cartes topographiques. Au début du XVIIIe siècle, il est rare de trouver des plans parcellaires dans les autres pays européens. Une première expérience est réalisée dans le Milanais en 1718, mais reste une exception. Les autres cadastres existant en Europe, comme en Prusse et en Angleterre, ne sont pas accompagnés de plans parcellaires.
L'objectif de cette cadastration est d’établir une mesure équitable des biens fonciers. Plus de cent géomètres participent à l’opération. Ils lèvent d'abord un plan rapide de la commune, puis confectionnent des "planchettes" en assemblant les levées des parcelles. L’ensemble des planchettes constitue la mappe. Elle est à l’échelle de 1/2372.
Charles Emmanuel III, BH 6487
Le géomètre établit un registre des numéros suivis, dans l'ordre d'arpentage, avec mention de la nature des parcelles et les noms des propriétaires. Quand ce premier travail est achevé, l’estimateur reporte sur le « livre d’estime » les données sur le produit et les charges des parcelles, données recueillies auprès des habitants. Ces informations sont expédiées à Chambéry avec la mappe originale en noir et blanc. Celle-ci fait l'objet de deux copies légendées et coloriées au lavis. L'une est destinée aux archives d'État à Turin et l'autre à la paroisse. Généralement, la copie laissée dans la paroisse a disparu. La collection turinoise a été transférée à Chambéry en 1802.
Les relevés cartographiques sont accompagnés de registres. Ces matrices sont composées :
L'édit de péréquation du 15 septembre 1738, met en oeuvre l'utilisation du cadastre et prévoit le suivi des mouvements de propriétés foncières. Deux registres principaux sont prévus :
Cette collection est malheureusement incomplète.
Deux sources supplémentaires sont le fruit du travail de Dominique Barbero, fait dans le cadre d’un SIG (système d’information géographique).
Pour plus d'information sur ce cadastre : Le cadastre sarde de 1730 en Savoie.
Le cadastre dit « napoléonien » est un cadastre parcellaire instauré par la loi de finances du 15 septembre 1807. Sa mise en œuvre s’est achevée en 1850 en France continentale. Sa fonction initiale consiste à doter l'administration d'un outil fiable et rationnel pour répartir l'impôt entre les contribuables dans un système fiscal qui repose essentiellement sur la propriété foncière et immobilière.
Le cadastre napoléonien ne concerne en Savoie que trois cantons : L’Hôpital et Conflans réalisé entre 1808 et 1812, Saint-Pierre-d’Albigny réalisé entre 1809 et 1811 et Aiguebelle réalisé entre 1809 et 1812.
Pour les autres communes, seuls des tableaux, des expertises et des minutes ont été rédigés. En effet, sous l'Empire, la cadastration ne put être totalement faite pour la Savoie du fait de sa réintégration dans le royaume de Piémont-Sardaigne en 1815.
Le cadastre napoléonien comporte trois parties : les plans, les états des sections et les matrices. Il divise le territoire communal en sections. Les sections comportent une ou plusieurs feuilles. Elles sont constituées de parcelles, chacune appartenant à un propriétaire.
Entre 1815 et 1860, les anciennes mappes sardes redeviennent la référence cadastrale dans la majorité des communes du Département.
Napoléon Ier, 100J 21.
A partir de 1860, consécutivement à l’Annexion de la Savoie à la France, débute la confection de nouvelles matrices et de nouveaux plans, conformes au modèle français. Le cadastre "français" est donc la première cadastration complète effectuée par l'administration française sur les départements nouvellement créés.
Il est réalisé entre 1865 et 1926. Deux séries de matrices des propriétés non bâties existent, les matrices dites « marbrées », antérieures à 1913 et les matrices dites « noires », pour les années postérieures à 1913, l'une et l'autre nommées d'après la caractéristique de leur couverture.
Les matrices des propriétés bâties ont été conçues en 1882. En effet, la loi du 29 juillet 1881 prescrit de séparer les revenus cadastraux des propriétés non bâties et bâties. La révision décennale des propriétés bâties de 1910 entraîne la création en 1911 d’une nouvelle matrice des propriétés bâties, matrice mise à jour jusqu’à la rénovation.
Alors que beaucoup de modifications ont lieu à la fin du XIXème siècle, les plans ne sont pas mis à jour en fonction des mutations de propriété. Ces modifications sont notées uniquement dans les matrices cadastrales. Pour y remédier, la loi du 16 avril 1930 préconise la confection de nouvelles matrices et la refonte générale des plans. Cette loi instaure la mise à jour régulière des plans cadastraux afin de suivre les évolutions de configuration des parcelles.
Le service du cadastre a réalisé, pour certaines communes, des fiches de concordances entre les numéros de parcelles du cadastre rénové et du cadastre français.
Ces documents ont été, pour la plupart, numérisés et sont disponibles à la consultation via le site internet.
La rénovation cadastrale entraîne, dans les années 1930 à 1970, des mises à jour importantes des plans et des registres. Cette révision débouche sur la confection d’un nouveau cadastre dit rénové. Pour certaines communes, des concordances avec le premier cadastre français sont établies sous forme de fiches.
Toutefois, cette révision s’est avérée difficile à appliquer du fait de très nombreuses modifications parcellaires intervenues depuis la réalisation du premier cadastre français. La loi du 17 décembre 1941 instaure donc la rénovation du cadastre à partir de nouveaux levés parcellaires.
Le cadastre n’est pas une preuve de propriété, c'est un document fiscal.
Il permet de recenser l’individu qui paye l’impôt. Celui-ci n’est pas toujours le propriétaire légal : les femmes mariées, les mineurs, les copropriétaires, n’apparaissent pas ou mal.
Son exactitude n’est pas parfaite et les mutations sont souvent portées avec retard. Il arrive qu’il y ait des discordances entre les propriétaires des matrices du premier cadastre français et ceux du cadastre rénové.
Il n'est pas possible d'y trouver les droits de passage ou servitudes. Il faut se tourner vers les actes notariés ou leurs transcriptions hypothécaires pour en trouver la mention.
Pour des recherches plus contemporaines, nous vous invitons à consulter le site internet du service du cadastre.