Le choix du site de l’Esseillon répond à deux objectifs : barrer la route du Mont Cenis et ralentir les éventuels envahisseurs, le temps que les renforts envoyés par Turin puissent se déployer dans toutes les vallées frontalières du Piémont.
Le complexe défensif est constitué de cinq fortifications, dont chacune porte le nom d’un membre de la famille royale : Marie-Thérèse, Victor-Emmanuel, Charles-Félix, Charles-Albert et Marie-Christine. Il est implanté de part et d’autre des gorges de l'Arc, en amont de Modane.
La redoute Marie-Thérèse est construite au bord de la route royale, afin de surveiller le pont qui enjambe l'Arc. Les quatre forts positionnés dans la pente, de l’autre côté des gorges, assurent sa protection. Le territoire qu’ils peuvent défendre est vaste, allant d’Avrieux jusqu’au col du Mont-Cenis et s’appuie sur des postes d’observation en altitude.
Les bâtiments les plus importants, la redoute Marie-Thérèse et le fort Victor-Emmanuel permettent de prendre en tenaille les assaillants. Pièce maîtresse du dispositif, Victor-Emmanuel peut accueillir 1500 hommes. Il regroupe les locaux de l’état-major, les casernements de la garnison, les constructions à vocation logistique, un hôpital et une chapelle.
Les ingénieurs sardes se sont inspirés des théories développées au siècle précédent par un stratège français : le marquis de Montalembert. Basé sur des principes novateurs, avec une volonté de corriger les défauts du système Vauban, le système Montalembert s’adapte très bien au relief alpin. Il s’appuie sur plusieurs principes :
Ce système Montalembert se retrouve dans toutes les Alpes piémontaises, comme au fort de Bard qui ferme la vallée d’Aoste ou aux forts d’Exilles et de Fenestrelle, en Piémont.
Du côté français, la réponse à la construction des forts de l’Esseillon est fort l’Ecluse et le fort de Pierre-Châtel aujourd’hui dans l’Ain et la bastille de Grenoble. Leur objectif est de ralentir les troupes ennemies pour protéger Grenoble et surtout Lyon.
Construit à grand frais, inauguré par le roi et démonstration de la puissance de la couronne après la restauration sarde, le fort de l’Esseillon n’est finalement le théâtre d’aucun combat. Et pour cause ! Lorsque la Savoie devient française en 1860, le fort situé désormais en territoire français se trouve à contre-courant de la stratégie militaire car tourné vers la France ! Il n’a plus d’intérêt stratégique.
Le traité de Turin qui acte la cession de la Savoie et de Nice à la France, stipule que le fort de l’Esseillon doit être démantelé. Les français font un test de démolition sur le fort Charles-Félix. Cette opération étant trop couteuse, l’armée française ne tient pas son engagement et le génie décide de retourner le fort en bouchant les ouvertures du côté français et en ouvrant d’autres en direction du col du Mont-Cenis.
Après la défaite de 1940, le fort Victor-Emmanuel est utilisé jusqu’en 1943 par les Italiens comme camp d’internement pour des soldats niçois. A partir de 1943, deux bunkers allemands en béton sont inclus dans le fort.
Parvenus jusqu’à nous, les forts offrent aux visiteurs un très bel exemple de l’architecture militaire défensive du 19e siècle et dans la redoute Marie-Thérèse, un centre d’interprétation du patrimoine fortifié. De nombreuses activités sportives et de découverte sont proposées à proximité immédiate du site.
Monument historique