Les remparts de Chambéry

Occupé à l'époque gallo-romaine, le site de Chambéry intéresse dès le 13e siècle les comtes de Savoie qui étendent leurs territoires et leur influence. Ils font du château le siège de leur administration et fortifient la cité. La ville vit à l'abri de ses remparts jusqu'à la fin du 18e siècle, date de leur tardive destruction. Aujourd'hui la tour Trésorerie du Château des ducs de Savoie, la tour Bossue et de précieuses représentations, témoignent de cette enceinte urbaine.

La Maison de Savoie à l'origine de l'essor de la ville

Si la colline de Lémenc est occupée dès l'époque gallo-romaine, Chambéry prend véritablement son essor à l'arrivée de la Maison de Savoie. Quand le comte Thomas Ier achète la ville en 1232, Chambéry est peu peuplée mais sa position centrale, au carrefour des principales routes vers la France, l'Italie et Genève en fait une ville idéalement située. 

 

Grâce à une politique économique efficace et l'octroi de franchises aux habitants, comme des droits particuliers ou des exemptions de taxes, celle-ci se développe vite. les comtes achètent le château en 1295, le transforment en une véritable forteresse médiévale et y installent le siège de leur puissante administration !

Une ville à protéger et à fortifier

Il est désormais nécessaire de protéger efficacement cette ville à la croisée des routes, son marché et ses péages. Lorsque les comtes de Savoie achètent la ville, une première enceinte existe déjà. Mais celle-ci n'est pas suffisante pour protéger la ville des routiers, ces mercenaires au service du roi de France, sans emplois pendant les trêves et qui pillent les territoires voisins. La construction d'une nouvelle muraille commence donc au milieu du 14e siècle. Le chantier est long. Amédée VI dit le comte vert, décide d'accélérer les travaux. Terminée en 1444, la nouvelle enceinte englobe la ville de Chambéry et le château qui est désormais partie intégrante du système défensif. 

 

Rapidement, pour mieux se défendre contre les armes à feu, cette enceinte d'une hauteur moyenne de 7 mètres est renforcée avec un système de "fausses braies" : un second mur, moins haut et séparé du premier par un fossé est élevé. 

L'enceinte est ponctuée de tours et de tourelles semi-fortifiées. Elle comporte 3 portes. La porte de Maché en direction de la France, la porte du Reclus en direction de Genève et la porte d'Italie en direction de Turin viale col du Mont Cenis. Ces portes sont des tours carrées à deux étages, accessibles par un pont-levis. Elles sont fermées au coucher du soleil afin de contrôler les entrées des hommes et des marchandises en ville. Un passage relie le rempart de la ville et le mur d'enceinte du château au niveau de la porte de Maché. 

Plan de Chambéry durant le règne d' Emmanuel-Philibert, Lannoy de Bissy, 1927, ©Archives départementales de Savoie, fi_609. Les remparts et les trois portes d'accès à la ville sont représentés.
Plan des canaux. Ici la porte du Reclus et la route vers Genève. On peut apercevoir les fausses braies du rempart. 18e siècle, ©Archives départementales de Savoie, 1fi_c_100
Plan des canaux. Ici la rue Croix d’or et une partie des remparts de Chambéry, 18e siècle, ©Archives départementales de Savoie, 1fi_c_113
Plan des canaux. Le Château des ducs de Savoie avant l’incendie qui détruisit l'aile médiévale, ponctuée de tourelles, au nord. 18e siècle, ©Archives départementales de Savoie, 1fi_c_120
Plan des canaux. La route menant vers la porte du Reclus couverte par les remparts. On aperçoit également l’ancien hôpital de la Charité, 18e siècle, ©Archives départementales de Savoie, 1fi_c_135

La tour du Nord et l'utilisation des armes à feu

L'apparition de la poudre et l'évolution des techniques de guerre entraînent une adaptation des fortifications. Certains ouvrages sont même intégralement conçus en conséquence. C'est le cas de la Tour Trésorerie, initialement nommée Tour du Nord, chargée de défendre le château des comtes de Savoie avant la construction des remparts. Elle est construite au 14e siècle pour utiliser l'artillerie naissante.

La tour dispose d'une défense par le haut avec chemin de ronde, archères et cannonières ainsi qu'une défense par le bas avec 7 cannonières disposées pour un tir rasant, près du sol, chargé de faucher les troupes ennemies. Les angles de tir des cannonières montrent l'efficacité du système. 

Défensive à l'origine, la tour conserve au 15e siècle le trésor des chartes, documents et archives de la Maison de Savoie, avant d'occuper des fonctions administratives au 18e siècle en acceuillant le service de la trésorerie générale. 

La tour Trésorerie aujourd'hui. En partie basse, les batteries dans lesquelles se trouvent les canonnières. Reconstitution numérique. ©Département de la Savoie, O.Veissière.
Batteries basses de la tour trésorerie. Elles comptent 7 chambres de tirs pour le tir au canon. Reconstitution numérique, 2017, ©Département de la Savoie, O. Veissière
Illustration de la portée du système de canonnières de la tour. Reconstitution numérique, 2017, ©Département de la Savoie, O. Veissière
Les bouches à canon au pied de la tour, ©Département de la Savoie
Le sommet de la tour Trésorerie avec ses mâchicoulis et ses ouvertures rectangulaires pour les armes à feu, ©Département de la Savoie

La fin des remparts

Délaissée au profit de Turin au 16e siècle, Chambéry n'évolue plus réellement et garde son caractère médiéval. L'enceinte, qui n'est plus adaptée aux évolutions de l'artillerie, devient un carcan pour la ville et l'empêche de se développer. Il faut attendre 1792 et la prise de Chambéry par les armées révolutionnaires françaises pour que des mesures soient prises. Le général de Montesquiou décide la destruction immédiate des remparts. Ceux-ci sont effectivement détruits mais Chambéry ne développe réellement son urbanisation qu'à partir du 20e siècle. 

La tour Bossue aujourd'hui, prise dans les habitations, rue Jean-Pierre- Veyrat, ©Département de la Savoie